De Maëlle Rabilloud, YWCA Mondiale du bénévolat.
Maelle Rabilloud
Bénévole à la YWCA Mondiale depuis le 1er juillet 2013, je n’envisageais pas de rester à Genève en septembre. Mais après avoir passé deux mois fantastiques ici, lorsque l’on m’a parlé de la possibilité d’assister à la 24ème session du Conseil des Droits de l’Homme, je n’ai pas hésité une seconde pour donner ma réponse : un grand OUI ! J’avais déjà eu l’opportunité d’assister en juillet à la 55ème session du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, qui s’occupe de suivre la mise en œuvre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW – 1979) et j’avais déjà été impressionnée par le niveau des débats et les rencontres que j’avais faites. Cela m’a ouvert les yeux sur tellement de sujets dont j’ignorais la profondeur, comme par exemple l’ampleur de la violence et de la torture faites aux femmes en République Démocratique du Congo. J’ai aussi été profondément choquée par différents récits.
Suite à cette expérience, mes collègues m’ont proposé de participer au Conseil des Droits de l’Homme. Donc me voilà prête, le 9 septembre, pour assister à cette 24ème session à l’ONU, dans la fameuse salle XX. La première chose que l’on remarque est le gigantesque plafond sculpté et coloré qui surplombe la salle, œuvre d’art de l’espagnol Barceló. Il est absolument impressionnant dès la première minute où l’on rentre dans la pièce. Cela permet aussi de repérer les « habitués » du Conseil des Droits de l’Homme, et les « nouveaux » puisque, évidemment, les nouveaux ont tous la tête en l’air alors que les habitués n’y prêtent plus attention.
(Copyright UN Geneva Information Service)
Le premier jour, pour l’ouverture, il y avait énormément de monde, il était difficile de se trouver une petite place ! Ensuite, cela s’est calmé, on a pu avoir accès aux places assises et à la traduction. Des discours très prenants se sont enchainés sur les situations des droits de l’homme les plus critiques à l’heure actuelle (le cas de la Syrie était très souvent cité, mais aussi sur l’Égypte, le Bahreïn, Israël/Palestine…). L’après-midi du jour d’ouverture, le Conseil des Droits de l’Homme recevait la première ministre thaïlandaise, Mme Yingluck Shinawatra cela montre la renommée et l’importance de ce Conseil des Droits de l’Homme.
Tout était nouveau pour moi, je regardais partout, j’ai observé la façon dont les diplomates se comportent, comment ils communiquent entre eux ou négocient informellement, ou encore comment certains viennent juste au moment de lire leur texte et repartent aussitôt. Et j’ai trouvé ça assez frustrant que chaque État n’ait le droit qu’à 3 minutes de parole, ils ont à peine le temps de s’exprimer en profondeur sur un sujet. Les différentes sessions se déroulent quasiment toutes de la même façon. Elles commencent par un exposé de la situation en question ou l’explication d’un rapport qui intéresse les droits de l’homme par un expert, et sont suivies d’un « débat » que je qualifie plutôt de « commentaires » de chaque État et parfois de certaines ONG. Les États n’ayant la parole que pour 3 minutes, peu de choses sont vraiment dites, et tous veulent parler donc il est difficile d’avoir vraiment un dialogue interactif et un débat. Il faudrait réfléchir à une solution pour rendre ce dialogue plus « vivant » mais ayant un temps limité et un très grand nombre d’États, cela me semble compliqué.
En plus du Conseil des Droits de l’Homme « officiel » dans la salle XX, il y avait tous les jours des réunions informelles ainsi que des « side events » organisés par certaines missions permanentes auprès de l’ONU ou diverses ONG. Je dois reconnaître que ce sont ces réunions qui m’ont le plus intéressées lors du Conseil des Droits de l’Homme. Les « side events » duraient en général 2h et abordaient un sujet précis, présenté par des experts en la matière ce qui était particulièrement intéressant. Habituellement 4 ou 5 panelistes expliquaient leur point de vue, leur propre expérience dans leur pays, et ensuite la présentation était suivie de questions/réponses avec les personnes qui assistaient à l’événement (des membres de missions permanentes d’un État, des membres d’ONG…). Lors de ces side events, on avait vraiment la possibilité de présenter son point de vue, de réagir à certaines présentations, et certains échanges et sujets étaient très captivants. À titre d’exemple, je peux citer certains de ces side events que j’ai particulièrement appréciés : “Human Rights and armed conflict” ; “The International Criminal Court 15 years after the Rome Statute: Prospects for the future” ; “Decriminalizing abortion”; “ State practices and challenges in human rights education for women”; “Women defenders in conflict zones”…
De plus, j’ai eu la chance d’assister aux négociations de certaines résolutions. La résolution que la YWCA Mondiale a particulièrement suivie concerne « Child, Early and Forced Marriage ». J’ai beaucoup appris lors de ce processus. C’était une opportunité géniale pour moi de pouvoir être plongée au cœur même des négociations, de suivre la création du droit dès le début. Il faut y voir pour y croire, je ne pensais pas que l’on pouvait réellement débattre pendant des heures sur l’utilisation de tel ou tel mot employé, je comprends maintenant toute l’importance du moindre mot, suivant la définition propre qu’en ont les États. C’est un processus vraiment particulier et je suis heureuse d’avoir pu en observer le fonctionnement, de voir quel rôle une ONG peut jouer, comment les États s’influencent entre eux, la façon dont ils essaient de négocier encore après, dans les couloirs… Et je suis encore plus ravie de savoir que la résolution a été adoptée à l’unanimité, prenant en compte une de nos remarques (l’ajout de la notion d’inégalité homme/femme comme l’une des causes principales des mariages forcés pour les jeunes filles).
En conclusion, je remarque que j’ai été effectivement bien plus impressionnée par le Conseil des Droits de l’Homme que par mes précédentes expériences. Je ne regrette vraiment pas ma décision, ça a été une opportunité formidable. Je dois ajouter que j’ai eu la chance de ne pas être seule et d’avoir beaucoup appris grâce à une fervente défenseuse des Droits de l’Homme, Marie-Claude Julsaint. Elle a été une excellente professeure ayant un vrai don pour expliquer les choses simplement. Elle est vraiment passionnée par ce qu’elle fait, ce qui donne encore plus envie de s’y intéresser ! Enfin, cela m’a permis de mettre un sens « pratique » à tous mes cours théoriques, de mieux comprendre le fonctionnement du droit international, de découvrir beaucoup de choses, et surtout, cela m’a confirmé mon envie de travailler dans le milieu des droits de l’homme.
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